ARTS VISUELS ET GASTRONOMIE
L’art est aussi au menu !
La Presse
Sur l’avenue Laurier, dans le quartier Outremont, on peut désormais se restaurer tout en profitant d’un panorama de créations d’artistes québécois. Le restaurant Wilfrid vient en effet d’innover en installant une cinquantaine d’œuvres d’art dans ses salles. Une initiative de l’artiste montréalais Hugo Bergeron.
À Montréal, un grand nombre de restaurants ont délaissé les reproductions d’œuvres d’art pour de véritables créations qui enjolivent l’expérience gastronomique de leurs clients. Mais, la plupart du temps, les œuvres ont été achetées par le propriétaire ou sont exposées pour une durée déterminée.
Le restaurant Wilfrid vient de concrétiser ce mois-ci un projet original intitulé
. Ses murs présentent 50 œuvres de 28 artistes, dont certains sont déjà bien établis sur la scène québécoise, par exemple Simon Bilodeau, Paul Bourgault, Jason Cantoro, Pierre Durette, Pierre-Yves Girard, David Lafrance, Laurent Lamarche ou encore Mathieu Latulippe.L’initiative émane du peintre Hugo Bergeron, qui travaille au Wilfrid comme serveur depuis déjà quelques années. Un artiste doit bien vivre !
« Depuis un moment, Hugo me disait que pour décorer le restaurant, on pourrait mettre quelque chose de plus dynamique et de plus vivant que ce qu’on avait auparavant », dit Michel Ross, chef exécutif et associé du Wilfrid, ex-cuisinier des restaurants La Brunoise et MAS Cuisine et qui enseigne la restauration depuis quelques mois.
« J’avais dit à Michel qu’il serait bien de donner écho au style du restaurant, à la fois classique et contemporain, avec quelque chose de professionnel et de qualité. »
— Hugo Bergeron, peintre
Quand on entre dans le restaurant Wilfrid (ex-La petite ardoise), on découvre un peu l’atmosphère des cafés parisiens du début du XX
siècle, aux murs tapissés de tableaux. Hugo Bergeron a repris ce concept en assemblant les œuvres de belle façon sur quatre des murs du restaurant.Ces œuvres ont été choisies en harmonie avec l’ambiance de l’établissement. « On n’est pas un restaurant branché qui met la gomme sur le décor, dit Michel Ross. Mais on voulait que ce soit professionnel et que ça donne une énergie à la salle. »
Quand les clients demandent des explications sur les œuvres, on leur remet un document sur lequel sont indiqués, pour chaque cadre, le nom de l’artiste, le titre, l’année de création, les matériaux utilisés et les dimensions. Le prix (variable comme le menu !) n’est pas indiqué. Le Wilfrid ne veut pas se substituer aux galeries. Si un client est intéressé par un artiste, on lui fournit ses coordonnées. Le restaurant ne perçoit aucun pourcentage sur la vente des œuvres.
« Cette présentation est juste un ajout au circuit officiel, dit Hugo Bergeron. Le but est de faire découvrir des artistes qu’on connaît peut-être moins. » Une œuvre a récemment accroché l’œil d’un client. La transaction est en cours. Dès qu’une œuvre sera vendue, elle sera remplacée par une autre. Hugo Bergeron prévoit ainsi élargir le spectre des artistes exposés.
Le jeune peintre trentenaire aime cette expérience qui s’apparente plus ou moins à un commissariat d’exposition.
« Pour moi, c’est nouveau. Ça m’a sorti un peu de mon atelier et d’une vision centrée sur ma pratique. J’ai beaucoup appris. »
— Hugo Bergeron
Quant à Michel Ross, il apprécie tellement cette initiative qu’il envisage de la poursuivre dans la cour intérieure du restaurant en installant des sculptures ou des photos de grand format.
« J’aime l’art en général, dit-il. Et puis, on veut que les gens soient confortables au restaurant, que ça bouge et qu’ils reviennent ! Comme pour les arts visuels, on travaille en cuisine dans un milieu marqué par la précarité, mais aussi par la recherche, le professionnalisme, le dévouement et la passion. On espère donc que cette expérience – dont le mérite revient à Hugo – va se poursuivre longtemps. »
, au restaurant Wilfrid, 222, avenue Laurier Ouest, Montréal